Le Coordonnateur des ministres conseillers, Janvier Yahouédéhou, est au centre d’un recours déposé devant la Cour Constitutionnelle par quatre juristes béninois. Dans leur plainte introduite jeudi 13 février 2025, ils dénoncent des propos qu’ils jugent inconstitutionnels, tenus par l’ancien député sur la possibilité d’un mandat supplémentaire pour le président Patrice Talon.
Depuis plusieurs semaines, les appels en faveur d’un maintien du chef de l’État au-delà de 2026 se multiplient au sein de la mouvance présidentielle. Lors de son passage sur l’émission Focus de la télévision nationale, dimanche 09 février 2025, Janvier Yahouédéhou a lui aussi plaidé pour une continuité du régime, déclarant : « Tant que le Président Talon fait bien, pourquoi le remplacer ? ». Pour appuyer son argumentaire, il a utilisé une métaphore aéronautique, comparant le Bénin à un avion en plein décollage, qui risquerait « un crash » si l’on décidait de changer de pilote avant sa stabilisation.
Ces propos n’ont pas manqué de faire réagir. Pour les requérants, il s’agit d’un appel déguisé à une remise en cause de la limitation des mandats présidentiels, une disposition clairement établie dans la Constitution béninoise. Les juristes rappellent que la question de la limitation du mandat présidentiel a été définitivement réglée dès 1990 avec l’adoption de la Constitution du Bénin. La révision du 7 novembre 2019 est venue renforcer cette règle, en précisant que nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels au cours de sa vie.
Face à cette situation, les requérants estiment qu’il est du devoir de tout citoyen attaché au respect de l’ordre constitutionnel de saisir la Cour afin qu’elle clarifie sa position et garantisse la préservation des principes démocratiques. L’affaire Janvier Yahouédéhou n’est pas sans rappeler une décision précédente de la Cour Constitutionnelle. Dans son arrêt DCC 14-156 du 19 août 2014, la Haute juridiction avait statué sur des propos similaires tenus par l’ancienne ministre Fatoumata Amadou Djibril, qui plaidait pour un troisième mandat de l’ex-président Boni Yayi.
La Cour avait alors rappelé que la liberté d’expression, bien que garantie par la Constitution, ne saurait justifier des appels à la remise en cause des principes fondamentaux. Elle avait également insisté sur la responsabilité accrue des personnalités publiques, dont les prises de parole ont un impact majeur sur l’opinion publique.
Que demandent les requérants ?
Les auteurs du recours sollicitent la Cour Constitutionnelle pour se déclarer compétente et recevoir la requête. Rappeler que Patrice Talon est bien dans son second et dernier mandat. Affirmer que les propos de Janvier Yahouédéhou constituent une violation des articles 34, 35 et 124 de la Constitution.
Avec cette procédure, les juristes veulent éviter tout glissement du débat politique vers une remise en cause des acquis démocratiques. L’issue de ce recours pourrait ainsi réaffirmer avec force que la limitation des mandats présidentiels au Bénin n’est ni négociable, ni sujet à interprétation politique.